LA FORMATION DOCUMENTAIRE

UN ENJEU POUR LE TROISIEME MILLENAIRE

JM303

Jean MICHEL

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In " La bibliothèque, partenaire du projet pédagogique &endash; Compte rendu des Ateliers Francophones sur la Formation Documentaire &endash; Gembloux &endash; 13-15 octobre 1997 " pp. 17-26 - 32 ko

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PLAN

1 - L'information-documentation au coeur d'une nouvelle société de l'immatériel

2 - L'impact des nouvelles technologies de l'information

3 - Les nouvelles pratiques sociales autour de l'information

4 - Formation documentaire et culture de l'information

5 - Une convergence d'actions, des efforts d'innovation sur la longue durée

6 - Inventer, expérimenter, capitaliser, échanger, surtout rester ouvert et flexible


La formation documentaire : un enjeu pour le troisième millénaire? Le titre proposé pour cette intervention est bien ambitieux, tant il est vrai qu'il est bien difficile de dire ce qui se passera dans mille ans, en 2997. Une chose est sure toutefois, c'est que les jeunes que nous formons aujourd'hui dans nos écoles et universités seront dans les 3, 5, 10 ou 20 prochaines années, des acteurs essentiels de la nouvelle société de l'information que nous commençons à voir émerger. Ils en seront des citoyens responsables, à condition toutefois de les avoir sensibilisés et préparés à jouer ce rôle. Tout l'enjeu de la formation documentaire, ou formation à l'information-documentation est là.

La formation documentaire : un luxe ou une nécessité? S'agit-il d'une nouvelle lubie ou obsession de quelques "documentalomaniaques" qui veulent démontrer ou légitimiser par là-même leur utilité dans la nouvelle société de l'information? S'agit-il, par la formation documentaire si unanimement louée, de "blinder" les bastions d'un conservatisme professionnel aujourd'hui mis à mal par l'omniprésence d'un Internet incontournable mais souvent jugé irresponsable et désorganisateur? Ne serait-on pas au contraire enclin à penser qu'il s'agit désormais d'un préalable indispensable au développement équilibré d'une société de l'information et de la connaissance en train de se construire?

La formation documentaire, ou encore formation à l'information spécialisée (ou formation à l'IST - information scientifique et technique -), a connu quelques développements intéressants dans différents pays, comme par exemple en France depuis les années 75-80. Plus récemment émergent de nouvelles expressions comme celle de culture de l'information ou infoculture, alors que les experts du monde anglo-saxon évoquent aujourd'hui le besoin de développer une véritable "mediacy" face à l'omniprésence du document numérique et à la généralisation des usages des réseaux électroniques.

L'information-documentation est à la fois une affaire de professionnalisme et de citoyenneté. S'il est indispensable, dans un certain nombre de situations, de recourir à des professionnels convenablement formés pour mettre à accèder à des ressources pertinentes et utiles, il est tout aussi important de donner dans le même temps à chacun le bagage suffisant lui permettant d'être acteur efficace de la société de l'information, c'est tout l'enjeu de la formation documentaire.

1 - L'information-documentation au coeur d'une nouvelle société de l'immatériel

Les évolutions dans le domaine de l'information et de la documentation ont été réellement exceptionnelles au cours des vingt dernières années, la révolution Internet constituant la plus stupéfiante de ces transformations. Derrière ce constat, une réalité évidente : les hommes, et la société ne peuvent vivre et se développer sans échanger de l'information et cela est d'autant plus vrai aujourd'hui que nous sommes entrés dans une véritable société de l'immatériel. Information et documentation constituant deux facettes indissociables d'une même entité, on peut dire que le besoin d'information-documentation est réel, plus fort que jamais, à un moment où les diverses communautés humaines sont de plus en plus interdépendantes grâce à de nouvelles solutions technologiques rendant plus aisé l'accès à la connaissance et aux informations utiles.

L'information-documentation est pleinement à l'oeuvre dans les dispositifs de formation. Elle l'est à l'évidence dans le rôle essentiel que jouent les bibliothèques dans l'accompagnement de l'enseignement. Mais peut-on parler raisonnablement d'enseignement à distance aujourd'hui sans évoquer l'indispensable arrière-plan documentaire à mettre à disposition? Cette information-documentation est aussi présente dans les diverses pratiques professionnelles allant de la recherche (de la veille technologique aux plus classiques investigations documentaires), à la conception de projets techniques en passant par la démarche qualité ou encore le management stratégique (besoin d'intelligence économique). Dans le même temps, la part de la ressource informationnelle incorporée dans les produits mis sur le marché ne cesse de croître, le coût de la matière grise ainsi figée dans les objets produits par l'homme surpassant de très loin celui du matériau lui-même.

On pourrait avoir tendance, pour simplifier la réflexion, à limiter les contours de cette information-documentation à ce que l'on connaît bien, par exemple, l'IST traditionnelle ou encore le marché des bases de données et des cédéroms. En fait l'information-documentation est quelque chose d'infiniment plus riche et de profondément multiforme, tentaculaire, caméléonesque. Pour l'entreprise, pour le chercheur, pour l'étudiant, pour l'individu, l'information se trouve sur des supports traditionnels comme le papier (livres, revues,...) mais est de plus en plus accessible via des vecteurs électroniques ou numériques, disponible sur place ou à distance. L'information-documentation est à la fois bibliothèque, base de données, revue spécialisée, site Web, forum électronique ou système de group-ware. Elle est la ressource clé de l'intelligence économique ou de la veille technologique ou stratégique, la substance essentielle des systèmes d'information géographique ou encore l'arrière-plan incontournable de tout dispositif d'archivage électronique.

La formation documentaire doit impérativement faire prendre conscience aux personnes concernées (élèves, étudiants, acteurs de l'entreprise, etc.) de l'extraordinaire potentiel de cette ressource immatérielle qu'est l'information-documentation, tout en révèlant aussi l'impressionnante et riche complexité et la profonde fécondité.

2 - L'impact des nouvelles technologies de l'information

Le développement prodigieux des nouvelles technologies de l'information au cours des dernières décennies aboutit aujourd'hui à une sorte de rupture de pente dans l'évolution de nos sociétés et plus nettement encore dans les pratiques d'information-documentation.

La généralisation de la microinformatique conduit à une banalisation d'un outil qui devient et deviendra plus encore la machine domestique ou professionnelle la plus proche de l'homme, son indispensable prolongement dans la pensée et l'action. La numérisation généralisée des données et des documents facilite les opérations de traitement, de diffusion, d'exploitation de l'information (au delà des traditionnelles barrières de formats ou de standards) et en réduit considérablement leur coût. Les capacités accrues de stockage de ces données numérisées et le développement des réseaux à haut-débit conduisent à de nouvelles perspectives pour l'archivage, la diffusion et la valorisation de nos pensées et de nos travaux. Les réseaux de télécommunications et leurs performances de plus en plus exceptionnelles, qu'ils soient matériels (réseaux de téléphone, fibre optique,...) ou plus immatériels (transmission par satellites, téléphonie cellulaire,...), renforcent l'interdépendance des diverses sociétés et contribuent largement à de nouvelles structures d'association ou de coopération.

Le couplage des diverses technologies précédentes, notamment les réseaux d'interconnexion des ordinateurs et l'interopérabilité de ces réseaux, constitue sans doute le fait majeur qui permet de parler aujourd'hui de société de l'information. Le phénomène Internet est sûrement l'événement le plus marquant de cette fin de millénaire. Paradoxalement son succès est moins dû à l'invention d'une nouvelle technique qu'à la force d'une formidable innovation socio-économique et sociétale qui permet le développement d'une véritable socio-intelligence à l'échelle planétaire.

Les nouveaux langages structurés, l'hypertexte et les outils d'ingénierie linguistique (agents intelligents de recherche, interfaces utilisateurs-machines,...) conduisent à des progrès substantiels dans la convivialité des dispositifs techniques et dans la consultation de volumes considérables de données, quelles qu'en soient leurs origines, leurs langues, leurs formats. De nouvelles logiques de mises en relation des documents entre eux apparaissent qui elles-mêmes renvoient à de nouvelles possibilités de relier les hommes entre eux.

La formation documentaire est directement concernée par l'existence de ces nouvelles technologies de l'information. Celles-ci par leur caractère attractif, voir ludique, contribuent sûrement à la motivation des personnes à former (les jeunes générations notamment). Elles constituent bien évidemment aussi des modalités incontournables pour l'accès à de nombreuses sources d'information et il importe de former les individus et les groupes à leur usage efficace. Enfin, elles peuvent même être utilisées comme vecteur de formation, comme le montrent bien certaines réalisations récentes (projet EDUCATE ou Into-Info par exemple).

3 - Les nouvelles pratiques sociales autour de l'information

Les nouvelles technologies rendent désormais possible et aisé l'accès à l'information, tant en volume de données mis à disposition, qu'en spectre ou diversité de cette information ou encore en origines des sources émettrices. Toutefois cette apparente et subite surabondance peut engendrer aussi beaucoup de nuisances qu'il faudra apprendre à maîtriser (diffusion d'informations non pertinentes, manipulations indélicates, saturation des réseaux, ...).

Les technologies conduisent aussi l'individu à être réellement à la fois utilisateur et producteur d'information, la communication n'étant désormais plus strictement unidirectionnelle (en jouant sur un néologisme franglais, on pourrait dire qu'il devient ou redevient un "produser"). L'interactivité des nouveaux systèmes d'information est bien au coeur de la mutation en cours. Mais la libre expression sur les réseaux peut vite se transformer aussi en cauchemar suite à des usages illicites des réseaux ou à des démarches non contrôlées de prosélytisme abusif.

Le nouvel environnement engendré par les nouvelles technologies est celui de l'ouverture des frontières, de l'internationalisation et de la mondialisation des échanges d'information. Le nouveau village global mondial devient peu à peu notre référentiel et l'information numérique circulant sur les réseaux crée les conditions de nouvelles formes de créativité. Mais le risque est grand aussi de voir s'instaurer de regrettables situations de dépendance vis à vis de nouveaux monopoles sur la diffusion de l'information.

Enfin il est intéressant de constater l'intégration plus poussée de ces nouvelles ressources informationnelles dans les différentes pratiques humaines, professionnelles ou non. Ainsi apparaissent de nouvelles modalités de travail (télétravail), de même que se multiplient les expériences d'enseignement et de formation à distance. De véritables innovations sociales émergent en matière de téléassociations, de clubs virtuels, de collaboratoires ou de collecticiels d'apprentissage et de recherche, avec en arrière-plan la constitution de véritables "forums de connaissances et d'information-documentation".

Dans ces conditions, la formation documentaire doit impérativement mettre l'accent sur le rôle des acteurs (citoyens ou professionnels) face à l'information-documentation. Une chose est d'apprendre le maniement des outils documentaires, la recherche et l'exploitation optimales des ressources informationnelles, mais plus important encore est la préparation des personnes (notamment des jeunes) à produire et diffuser de l'information de qualité, à savoir partager et valoriser collectivement l'information et à développer une réelle créativité, tant individuelle que collective, autour de l'information-documentation.

4 - Formation documentaire et culture de l'information

Les hommes sont-ils vraiment sensibilisés et formés à devenir des citoyens de cette nouvelle société de l'information? Sont-ils préparés à être des acteurs efficaces et responsables de nouvelles communautés vivant de l'échange d'information? Le développement de cette culture particulière ou infoculture passe en priorité par l'éducation comme par la formation générale ou professionnelle, initiale ou continue ou encore par la sensibilisation du grand-public. De nombreux rapports ont mis l'accent sur l'importance et la nécessité d'une bonne sensibilisation des enfants, des étudiants et des professionnels et plus généralement des citoyens aux enjeux de l'information aujourd'hui. Ils insistent sur le besoin de préparation méthodologique aux démarches modernes d'accès à l'information, qu'elles s'appuient sur des dispositifs censés être bien connus comme les bibliothèques ou sur des usages plus avancés et nouveaux des technologies numériques en réseau. Ces rapports ne manquent pas aussi de mentionner la nécessité de développer une prise de conscience des conséquences sociales, économiques, juridiques et culturelles de la nouvelle société de l'information.

De telles actions de sensibilisation ou de formation doivent viser différents objectifs. Il faut d'abord, par des actions de sensibilisation, amener les personnes concernées à percevoir et à comprendre ce qui est en train de se passer, identifier les éléments constitutifs de ce nouveau monde complexe et en forte évolution de l'information-documentation. Il faut ensuite leur faire comprendre les garnds mécanismes propres de l'information-documentation, les amener à être capable d'appréhender ce monde sans le craindre, sans le fuir, donc à en vouloir en devenir des acteurs-citoyens. Il est évident aussi qu'il faut très vite parvenir à faire maîtriser un minimum de savoir-faire, relatifs notamment aux outils, ressources et techniques de base de l'information-documentation et plus encore les méthodologies qui président à la production, au traitement, à la diffusion ou à la recherche de l'information. Il devient alors rapidement nécessaire d'aider les personnes en formation à acquérir des aptitudes nouvelles et des compétences plus spécialisées, être capable de jongler avec les nouveaux outils, savoir donner du sens à l'information manipulée, comprendre les contextes où cette information s'exprime. Il faut enfin que ces personnes deviennent des acteurs à part entière du système d'information, qu'elles soient capables d'intervenir pour le modifier ou pour créer et diffuser de nouveaux objets informationnels.

La formation documentaire doit résolument aller au delà de ce qu'on appelle traditionnement dans les bibliothèques, la formation des utilisateurs ("user education", voire même "user instruction"), vocable qui dénote d'une réelle et profonde incompréhension de la part des professionnels, bibliothécaires ou documentalistes, de ce que représente la société de l'information. La formation documentaire ne peut pas être purement instrumentale ; elle ne peut plus se concevoir comme un placage de petits savoirs ou savoir-faire relatifs à la consultation de fichiers de bibliothèques (avec ou sans recours aux équations booléennes). La formation documentaire est une réelle composante d'une éducation de la personne, futur professionnel et citoyen.

5 - Une convergence d'actions, des efforts d'innovation sur la longue durée

La formation documentaire ne se limite pas à la seule initiation faite lors de l'entrée de l'étudiant à l'université. Il faut à l'évidence multiplier les actions et inscrire celles-ci sur la longue durée. On pourrait aller jusqu'à parler d'une formation continuée, dispensée tout au long de la vie (tout au moins scolaire et étudiante). C'est aussi par la mise en place de structures ad-hoc et de programmes d'incitation variés que seront réellement atteints les objectifs.

Dans le cas de la France et pour illustrer cette affirmation, il peut être intéressant de rappeler l'effort entrepris depuis plusieurs années pour mettre à disposition des enfants les indispensables outils d'accès à l'information à travers les CDI, Centres d'Information et de Documentation, développés dans les divers collèges et lycées. La plupart des CDI sont aujourd'hui bien équipés en matière de nouvelles technologies numériques et d'accès aux réseaux. Des professionnels de l'information-documentation avec un statut de formateur y assurent des actions de sensibilisation à l'information.

A niveau des études universitaires, existe également en France, un réseau d'entités spécialisées dans la formation à l'information scientifique et technique, les URFIST (Unités Régionales pour la Formation à l'Information Scientifique et Technique). De telles structures conduisent des programmes de sensibilisation et de formation, notamment au niveau des premiers cycles universitaires. Orientées dès leur origine sur l'accès aux bases de données, les URFIST se tournent assez naturellement aujourd'hui vers les ressources disponibles via Internet.

Dans un secteur particulier de l'enseignement supérieur (les études d'ingénieurs), de nombreuses expériences ont été réalisées depuis une vingtaine d'années à l'initiative de la Conférence des Grandes Ecoles. De telles démarches de formation des étudiants futurs ingénieurs se sont largement multipliées au cours des 15 à 20 dernières années. Il est du reste intéressant de noter qu'il en a été de même au niveau mondial dans de nombreux pays, avec des approches très diversifiées ; la Fédération Mondiale des Organisations d'Ingénieurs (FMOI) a du reste réalisé un guide méthodologique publié par l'UNESCO à partir de ces formations documentaires dans ce domaine de l'enseignement supérieur.

Une autre réalisation symptomatique de cette volonté de développer une culture de l'information consiste en la réalisation d'un cours électronique "EDUCATE" (aujourd'hui diffusé sur Internet sour l'appellation Into-Info) de sensibilisation et de formation à l'information scientifique et technique. Ce cours élaboré dans le cadre d'un programme de la Commission Européenne est l'oeuvre d'un consortium de six grandes universités européennes. Basé sur un usage systématique d'Internet, ce cours présente la caractéristique d'être à la fois un outil et une ressource pédagogiques (des contenus précisément définis, des cheminements bien étudiés) et aussi un instrument d'orientation vers les sources utiles.

On pourrait encore souligner, pour la France, les efforts faits depuis 1994, par l'interassociation ABCD des archivistes, bibliothécaires, documentalistes et autres professionnels de l'information, pour le développement d'une culture de l'information. Plusieurs manifestations nationales ont permis d'attirer l'attention des pouvoirs publics et des professionnels et un manifeste a été rédigé et diffusé. Il est intéressant de noter la forte implication des milieux professionnels sur ce thème et la volonté collective de faire avancer les choses, en particulier de mettre sur pied une véritable action politique dans ce domaine.

6 - Inventer, expérimenter, capitaliser, échanger, surtout rester ouvert et flexible

Tout laisse à penser qu'il faut désormais placer la formation documentaire et la culture de l'information au coeur de nos préoccupations, au centre des projets des professionnels de l'information-documentation comme de ceux des éducateurs ou formateurs. On ne peut donc que se réjouir de la multiplication des manifestations consacrées à ce sujet, comme aussi de la publication d'ouvrages spécialisés à caractère méthodologique, de manuels traditionnels ou de cours électroniques permettant d'intensifier l'action pour une meilleure formation documentaire. Il faut encore saluer la création et le développement de la liste de diffusion électronique EDUDOC qui permet de fructueux échanges d'idées, points de vue, expériences et savoir-faire en matière de formation documentaire.

Pour atteindre les objectifs visés et pour aller dans le sens d'une formation documentaire pertinente, efficace et durablement reconnue, il faut libèrer un maximum d'énergies. Il faut inventer les solutions quand elles n'existent pas. Il faut oser expérimenter. Il faut surtout assurer une capitalisation des expériences, tout en permettant un très large échange d'idées sur ce thème.

La formation documentaire nécessite l'implication de nombreux acteurs, enseignants des diverses disciplines traditionnelles comme professionnels bibliothécaires, documentalistes. Elle doit viser à l'intégration de la démarche dans les cursus de formation, se penser comme une action structurelle de longue durée, s'inscrire dans un véritable projet pédagogique qui peut et doit conduire à redéfinir la formation même des individus et des groupes.

Plusieurs écueils doivent impérativement être évités. Les démarches mettant exclusivement l'accent sur les outils ou instruments documentaires comme les formations alibis qui visent à justifier l'existence de corporatismes professionnels étroits n'ont aucun intérêt et aucun avenir. Les formations qui restent centrées sur la seule "offre documentaire" ne sont guère plus satisfaisantes, l'essentiel étant de redonner la priorité à l'expression par l'individu de son besoin relatif à l'information (comme aussi au développement des potentialités de la personne en matière de production-diffusion de l'information de qualité). Il faut surtout éviter de s'enfermer dans des démarches trop rationalisantes ou hyperdéterministes, trop "normatives" aussi, et privilégier au contraire l'ouverture, la flexibilité, la multiplicité des approches, favoriser des démarches plus expérimentales et créatives. Il est important enfin de s'appuyer résolument sur les technologies nouvelles de l'information et de la communication et faire preuve d'imagination et d'audace pédagogiques pour intégrer ces nouvelles ressources dans la conception des modules de formation documentaire.

Dès lors la formation documentaire ou formation à l'information-documentation peut devenir la pierre d'angle d'une démarche éducative ambitieuse qui remet l'individu au coeur du dispositif d'apprentissage et qui privilégie pluridisciplinarité et compréhension de la complexité, démarche qui épouse aussi son temps et s'adapte parfaitement à son environnement tout en préparant l'avenir de façon efficace et prospective.