NOUVELLES APPROCHES DE LA FORMATION

PAR LES NOUVELLES TECHNOLOGIES ET LE MULTIMEDIA

LA DEMARCHE DE L'ECOLE NATIONALE DES PONTS ET CHAUSSEES

JM321

Jean MICHEL

Publications Jean MICHEL
Page d'accueil Jean MICHEL

Communication faite au Colloque organisé par Le Journal du Multimédia à Paris, les 13 et 14 octobre 1999.

PLAN

LES PONTS EN MOUVEMENT VERS LES TIC

APPROCHES, CONCEPTS ET MOTS CLES : LES TIC DANS LA FORMATION

LES CONSEQUENCES OU IMPLICATIONS PEDAGOGIQUES DES TIC

TYPOLOGIE DES APPROCHES POSSIBLES

LES "OBJETS" DE VIRTUALISATION

LES OBSTACLES OU DIFFICULTES

ENPC 1 : LES TIC EN APPUI DES PRATIQUES EXISTANTES

ENPC 2 : TIC, INNOVATIONS PEDAGOGIQUES, NOUVEAUX MARCHES

CONCLUSION

LES PONTS EN MOUVEMENT VERS LES TIC

Comme la grande majorité des établissements d'enseignement supérieur français ou étrangers, l'Ecole des Nationale des Ponts et Chaussées (ENPC) a désormais systématiquement recours aux TIC (technologies de l'information et de la communication) pour ses diverses activités d'enseignement, de recherche, de communication ou de diffusion de connaissances.

Cette institution, fondée en 1747, a toujours su intégrer les nouveaux outils de communication permettant le transfert et la partage des connaissances, ce qui s'est notamment traduit par d'intéressantes innovations socio-pédagogiques autour de l'usage de la lithographie dans les années 1830 puis celui de la photographie dans le courant de la deuxième moitié du XIXème siècle.

Au cours des cinq dernières années, l'Ecole des Ponts a surtout mis l'accent sur le développement intensif et collectif des usages d'Internet et des fonctionnalités associées. Il est vite apparu évident que personne au sein de l'Ecole ne devait rester à l'écart de ce mouvement de transformation des pratiques tant scientifiques que pédagogiques ou administratives. Ainsi a été généralisé de façon volontariste le recours à la messagerie électronique et aux forums d'échange et de discussion alors que se construisait de façon collective le site Web de l'Ecole. Des dizaines de sessions de formation ont été conduites de façon à mettre tout le monde en état d'être acteur dans la nouvelle Ecole électronique.

Des expériences de recours aux TIC dans la formation des ingénieurs se sont multipliées avec un certain succès aux Ponts au cours des dernières années : cours d'hydraulique urbaine en accès électronique, démarches pédagogiques originales poussées dans le domaine de l'informatique comme aussi dans l'enseignement des langues,… Il est aujourd'hui envisager multiplier ces pratiques et expériences et surtout de positionner l'Ecole de façon nouvelle par rapport à ce que permettent les TIC en matière de conquête de nouveaux marchés de formation (de l'enseignement à distance sur certains créneaux spécifiques à la diffusion de l'info-connaissance via les vecteurs électroniques nouveaux ou encore à la participation de l'Ecole aux plates-formes éducatives nationales ou internationales en émergence). C'est dans cette perspective que la direction de l'ENPC a engagé une réflexion de nature stratégique sur la question des TIC.

En décembre 1998, la Direction de l'Ecole a en effet décidé de conduire une réflexion collective de nature stratégique sur la façon d'aborder désormais la deuxième phase de ce développement. Ainsi étudie-t-on l'introduction plus systématique et organisée des TIC et des NTE (nouvelles techniques d'enseignement) dans les formations existantes (initiales comme continues) en même temps qu'est carrément posée la question du positionnement de l'Ecole sur un nouveau marché mondial de l'info-connaissance.

La culture de base de l'Ecole des Ponts n'étant pas a priori celle d'une institution vendant des TIC, il va de soi que ces dernières ne sont pas vues comme une fin en soi mais plutôt comme une occasion de s'interroger sérieusement à la fois sur les missions, les services et le fonctionnement de l'Ecole et sur la position de celle-ci dans le concert des grands établissements qui développeront et diffuseront la connaissance dans le cadre d'une société de l'intelligence moderne, ouverte et mondiale.

Il convient toutefois d'indiquer ici que le chemin à parcourir pour atteindre le niveau auquel sont parvenus aujourd'hui certains grands établissements étrangers sera long et vraisemblablement sinueux. La démarche de l'Ecole bute sur de réelles difficultés qui, pour l'essentiel, sont moins d'ordre technologique (encore qu'elles existent) et plus de nature culturelle : mentalités à faire évoluer, manque de maîtrise des TIC par les enseignants, difficultés pour définir et mettre en oeuvre une stratégie d'évolution-rupture par rapport aux modèles traditionnels de formation, investissements économiques à prévoir, etc.

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APPROCHES, CONCEPTS ET MOTS CLES : LES TIC DANS LA FORMATION

 L'usage des technologies de l'information dans la formation des ingénieurs (pour se limiter à ce champ d'action) n'est pas nouveau. Depuis une bonne vingtaine d'années, nombreux ont été les spécialistes de l'éducation qui se sont penchés sur l'apport de certaines technologies d'information et de communication (de l'audiovisuel éducatif à l'enseignement assisté par ordinateur). Aujourd'hui, le développement rapide et intensif des usages d'Internet, du multimédia et d'autres outils de groupware vient renouveler cette réflexion et cette action d'innovation pédagogique.

A travers les multiples conférences internationales des dix dernières années consacrées aux nouvelles approches de la formation des ingénieurs recourant aux TIC (conférences CAEE, CALISCE, RUFIS, NTICF,…), on peut noter que les expériences ou réalisations se font dans différents champs ou domaines :

 - enseignement et apprentissage assistés par ordinateur (computer aided teaching, learning or education) avec un fort développement dans le domaine des outils de modélisation et de la simulation ;

- cours électroniques et didacticiels (courserwares) qui se multiplient de façon quasiment sauvage aujourd'hui sur le Web  mais qui existent aussi sous forme de cédéroms commercialisés ou librement diffusés ;

- auto-formation et auto-apprentissage (self-education, self-learning) qui brusquement redeviennent d'actualité du fait de la grande souplesse offerte par les TIC et par un recentrage sur la démarche d'apprentissage autonome, personnalisée (par opposition à des approches traditionnelles exclusivement axées sur l'acte d'enseignement) ;

- formation ou enseignement à distance (distance education), avec la mise en place de structures lourdes (CNED, Open University,…) dont le marché ne cesse de croître aujourd'hui ;

- formation (ou apprentissage) ouverte et flexible (open and flexible learning) qui met l'accent sur la diversité des "routes d'accès" à la connaissance et à la compétence, tant au niveau des individus qu'à celui des groupes ou communautés apprenantes ;

- formation assistée par le multimedia (mediated education), forme plus avancée de la formation assistée par l'ordinateur ;

- formation et/ou apprentissage asynchrone (asynchronous learning) qui considère une nouvelle façon d'envisager le temps de la formation (pour l'individu comme pour le groupe), en jouant sur des nouvelles structurations temporelles des modalités de formation ou d'apprentissage;

- formation interactive (interactive learning) qui met l'accent sur les processus collectifs d'apprentissage et de formation ;

- formation coopérative (cooperative learning, education) basée sur les interactions entre différents groupes de personnes, apprenants, enseignants, tuteurs, etc. ; les outils de groupware, l'Intranet et les forums électroniques conduisent à mettre en place de nouvelles communautés apprenantes, à géométries variables (collecticiels d'apprentissage) ;

- viviers de connaissances ou bases de données éducatives (knowledge pools) conçus comme des instruments de capitalisation, de mise en commun et d'accès ouvert à de multiples ressources éducatives produites par des centaines de producteurs institutionnels acceptant de respecter certains standards communs de définition des "briques" pédagogiques ; l'action internationale autour du projet ARIADNE reflète bien aujourd'hui l'importance de ce courant qui privilégie la ré-utilisation maximale des ressources éducatives dans un contexte de partenariat large ;

- plates-formes d'enseignement ou éducatives (educational platforms) et systèmes de diffusion (distributed learning environments) qui rendent possible la diffusion large, mondiale d'informations et de connaissances (pour les sciences de l'ingénieur, le dispositif européen EUROPACE peut être cité comme un modèle de développement de telles plates-formes ;

- et finalement universités virtuelles (virtual universities) de différents types et pour différents objectifs et segments de marché ("université virtuelle francophone" de l'AUPELF, "université virtuelle africaine" soutenue par l'UNESCO et la Banque Mondiale, "Western Governors University" aux USA fédérant les forces de différentes universités traditionnelles, etc.). 

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LES CONSEQUENCES OU IMPLICATIONS PEDAGOGIQUES DES TIC

 En tout premier lieu, les TIC rendent possible l'accès décentralisé à de multiples bassins d'informations et de connaissances comme aussi de moyens éducatifs. Désormais la formation doit tenir compte de tout un système d'accès à diverses ressources éducatives, s'appuyant sur un environnement d'aide à la formation, plus complexe, plus ouvert, plus "dispersé" (distributed learning environment). L'étudiant ou apprenant peut être désormais amené à consulter aisément des ressources "externes" en nombre et volume très largement supérieurs à ce qu'il peut recevoir de sa propre institution.

Les TIC conduisent à raisonner en termes de délocalisation et de décentralisation. Le télétravail et la téléformation deviennent chaque jour d'avantage des réalités. Faut-il encore construire des Ecoles et d'immenses campus? Est-il encore nécessaire de rassembler systématiquement les apprenants en lieu donné pour leur dispenser un certain nombre d'enseignements ? En fait, le besoin de rassembler physiquement les apprenants en un lieu donné existe toujours, mais il convient d'en redéfinir le pourquoi (les raisons ou la nécessité fonctionnelle).

C'est aussi une autre perspective en matière de gestion du temps de la formation et de l'apprentissage. Grâce aux TIC il devient possible de choisir plus souplement les temps et les rythmes de l'apprentissage comme aussi ceux de la communication pédagogique (interpersonnelle aussi bien que collective). Cela permet de mieux s'adapter aux différents styles cognitifs d'apprentissage (plus lents, plus rapides,…). Cela permet aussi d'imaginer des modalités plus flexibles de formation à temps partiel, comme également pour la formation continue, des modalités plus judicieuses d'alternance entre périodes de travail et de formation.

L'apport des TIC est sensible aussi au niveau de la façon d'envisager de façon plus innovante et flexible les apprentissages individuels et collectifs. Elles permettent de satisfaire des besoins d'auto-formation et de mieux prendre en compte les parcours individuels (formation individualisée) et dans le même temps de tenir compte d'exigences de consolidation collective des apprentissages individuels, en jouant du reste sur des apports spécifiques de groupes ou communautés à géométrie variable.

Les TIC rendent possible de nouvelles interactions entre différents individus et différents groupes de personnes. Les collecticiels d'apprentissage, les forums électroniques, la messagerie, le tutorat électronique, les universités virtuelles sont l'occasion de penser la formation comme une "construction" permanente de savoirs personnels ou collectifs, à travers le jeu de différentes interactions entre des groupes de personnes : des apprenants (étudiants) échangent entre eux ou avec des groupes de personnes ressources (enseignants, tuteurs), etc. Ces expériences ont l'avantage de ne pas mobiliser de lourdes ressources techniques ou d'engager d'importants investissements en conception de programmes éducatifs.

Il est important aussi de souligner le fait que les TIC ne sont pas "unidirectionnelles" et conduisent à remettre en cause le traditionnel schéma de communication pédagogique "Maître>>>Elève". L'individu (ou le groupe) redevient lui même producteur d'informations et de connaissances et peut échanger et valider ses propres productions avec d'autres personnes ou groupes. Cette implication des apprenants dans la production et l'échange de ressources joue sérieusement sur la motivation des individus.

Notons encore le fait que les TIC ouvrent l'accès à des ressources au niveau planétaire et contribuent à instaurer une autre vision du monde. Elles aident l'apprenant à se situer dans un monde plus ouvert, plus divers, avec des composantes de variété culturelle et linguistique importantes, voire même indispensables, (formation ou apprentissage sans frontière). Elles obligent enfin à se poser la question de la citoyenneté dans la société de l'information et de la connaissance, à s'interroger sur des aspects d'éthique liée au développement de celle-ci. 

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TYPOLOGIE DES APPROCHES POSSIBLES

Une typologie des développements actuels en matière de cours électroniques et d'universités virtuelles, dans le domaine des formations d'ingénieurs conduit à distinguer :

- des Ecoles ou universités traditionnelles qui n'ont pas de stratégie spécifique en matière de TIC et au sein desquelles émergent, ici ou là, des initiatives individuelles consistant en la production par quelques professeurs de cours électroniques, pures transpositions TIC des cours "papier" ;

- des établissements qui expérimentent (explorent) de nouvelles voies et qui proposent un cadre de référence et un soutien institutionnel à des initiatives individuelles, avec financement éventuel de certains projets TIC ;

- des établissements réellement innovants qui s'impliquent fortement dans le développement de l'usage des TIC et qui poussent à la création de plates-formes d'apprentissage et de viviers de connaissances, créent aussi des structures ad-hoc pour repenser la "production de la formation " et son économie ;

- enfin de nouvelles structures, créées ex nihilo, véritables universités virtuelles, sans murs et même sans professeurs permanents, et où l'emploi des TIC devient un enjeu stratégique de conquête de marché.

Les développements actuels de l'usage des TIC mettent également en relief quatre grandes composantes fonctionnelles de la démarche globale de formation :

- la structuration des contenus de formation (composante conceptuelle et éditoriale pourrait-on dire) : développement des cours électroniques, re-définition, re-découpage et re-structuration des matières enseignées, "briques" élementaires des viviers d'info-connaissance,… ;

- la stimulation des interactions entre les personnes, étudiants, enseignants, tuteurs,… (composante de communication et interactivité pédagogiques) : tutorat électronique, communautés apprenantes, collecticiels d'apprentissage, forums, … ;

- l'innovation structurelle et institutionnelle : mise en place de partenariats, réseaux ou consortia autour des TIC, création de "pools", viviers coopératifs, création également de structures nouvelles spécialisées (ateliers multimédia, pools de compétences,…) ;

- l'approche stratégique et managériale visant à se positionner sur de nouveaux segments de "marché", avec des projets globaux autour de la création et du développement de nouveaux environnements d'apprentissage et de formation, en se situant d'emblée au niveau mondial. 

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LES "OBJETS" DE VIRTUALISATION

Quand on parle d'université virtuelle ou de TIC en formation on est amené à examiner plusieurs composantes ou "objets" du "système formation" pouvant être "virtualisés" :

a) Les personnes

- les apprenants individuels, qui peuvent accéder à distance à des ressources virtuelles (en plus ou à la place de la présence physique en salle de classe), qui peuvent aussi être "inscrits" réguliers, temporaires ou exceptionnels (cas par cas, produit par produit) ;

- différents groupes d'apprenants selon des géométries variables : groupes thématiques, groupes de projets, groupes fermés (équipes permanentes) ou ouverts (forums d'élaboration) ;

- les formateurs, notamment les enseignants ou fournisseurs de ressources : il peut s'agir d'enseignants exerçant déjà dans l'établissement comme aussi de nouvelles personnes ressources, non nécessairement et formellement inscrites comme enseignants ;

- différents groupes de personnes ressources, différentes équipes pédagogiques virtuelles ;

- des "tuteurs", parrains virtuels et autres contributeurs pour le suivi des stages, de projets, d'activités spécifiques ;

- des groupes ou communautés mixtes (apprenants, enseignants, tuteurs,…), permanents ou temporaires, ouverts ou fermés, constitués autour de projets spécifiques.

 b) Les contenus, matières, disciplines ou objets d'étude

 - les éléments didactiques, les enseignements disciplinaires traditionnels, "virtualisés" à différents niveaux : leçons élémentaires, modules de x heures, blocs d'enseignement,… ;

- les matériaux pédagogiques : études de cas, bibliographies d'appui, textes de référence, exercices, projets dont tout ou partie peut être virtualisé ;

- les cursus de formation ("curriculum") et les cheminements pédagogiques pour l'attribution des diplômes ou qualifications : cursus flexibles ou non, cheminements individualisés ou non ;

- les contenus "périphériques" et les autres sujets ou matières non nécessairement enseignés sur place mais disponibles en virtuel et vivement recommandés ;

 c) Les procédures d'évaluation

- les évaluations "formatives" qui permettent de s'assurer des qualités des progressions d'apprentissage et aident les apprenants dans leurs parcours pédagogiques : exercices, tests et questionnaires virtuels et/ou à distance, … ;

- les évaluations "sommatives" qui permettent de sanctionner les acquis d'un parcours : examens virtuels ;

- les évaluations des enseignements et de la formation dispensés : évaluation en ligne par les étudiants, groupes ou forums d'évaluation,…

 d) Les ressources d'appui logistique et pédagogique

 - les ressources informatiques et bureautiques : logiciels, programmes,… ;

- les didacthèques (collections de "coursewares"), cours électroniques,…;

- les documentations et bibliothèques virtuelles ;

- les logistiques liées aux stages et aux projets.

 e) Les procédures de gestion liées à la formation

- les procédures de sélection des futurs inscrits : tests, portfolios,…

- les modalités d'inscriptions proprement dites ;

- la gestion des frais d'inscription et des autorisations d'accès aux ressources ;

- le suivi des évaluations, la gestion des "notes".

 f) L'environnement extrascolaire

- les campus virtuels ;

- l'information sur les commodités: transports, logement, bourses, restaurants,… ;

- les loisirs, la vie des clubs, etc. 

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 LES OBSTACLES OU DIFFICULTES

Les expériences et réalisations faites ici ou là montrent bien que si l'on progresse en général assez vite vers un usage plus systématique des TIC dans la formation, de nombreux et sérieux obstacles ou freins subsistent. Ainsi relève-t-on généralement :

- un manque d'information sur les expériences ou réalisations existantes et un relativement faible niveau de transfert et diffusion des acquis;

- une carence sérieuse dans la sensibilisation et la formation des enseignants traditionnels en ce qui concerne l'usage des TIC couplée avec des effets de disparité dans la maîtrise des outils informatiques selon les générations et les cultures ;

- un manque d'équipements appropriés, tant en ce qui concerne les moyens collectifs (serveurs, réseaux,…) que les postes individuels de travail ou consultation ou encore les produits logiciels utiles ;

- le problème est plus grave encore en ce qui concerne la maintenance de ces moyens nouveaux, très exigeants, consommateurs de compétences techniques avancées ; certains parlent aujourd'hui (même sans aller jusqu'aux universités virtuelles de plein exercice) de "crise des logistiques" pour l'enseignement supérieur ;

- la faible vision stratégique des responsables des établissements de formation vis à vis du développement de l'usage des TIC ; ils semblent avoir du mal à impulser les réformes nécessaires et surtout à raisonner en termes de nouveaux marchés à conquérir ;

- le problème économique et financier ; avec les TIC, il convient de penser autrement l'économie de la formation avec, notamment, une part plus importante des moyens à affecter d'une part aux investissements initiaux (équipements, productions des cours électroniques, etc.) et d'autre part à la maintenance des systèmes mis en place ; il faut pouvoir rémunérer, pour cette activité nouvelle de nature pédagogique, des compétences qui interviennent à un moment ou à un autre dans le processus de production des cours électroniques, indépendamment du fait qu'ils seront ensuite en présence ou non d'étudiants (rémunération des prestations assurées en "présentiel") ;

- la propriété intellectuelle des nouveaux supports et cours : comment faire reconnaître et respecter le droit moral des concepteurs et comment rétribuer justement les créateurs de ces supports (droit patrimonial) et cela sans obérer les disponibilités des établissements en amenant ceux-ci à payer des sommes excessives (monopoles de fait,…) ;

- la difficulté à coopérer sur ce terrain à des niveaux nationaux ou internationaux, à établir des consortia pour la production et la diffusion de modules d'enseignement en ligne, à rassembler des équipes de compétences multidisciplinaires ;

- les règles du jeu en usage pour tout ce qui a trait aux démarches de sélection (avec ou non numerus clausus) et aux dispositifs d'accréditation et de certification des programmes de formation ; ces règles du jeu reflètent bien souvent des conceptions d'avant l'ère de la société de l'information qui exige désormais plus d'ouverture, de modularité et de flexibilité.

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ENPC 1 : LES TIC EN APPUI DES PRATIQUES EXISTANTES

Dans ce contexte, un premier axe de développement de l'usage des TIC à l'ENPC consiste à chercher à enrichir les pratiques pédagogiques existantes, tant en formation initiale qu'en formation continue :

- mettre des cours en accès sur site Web (en mode Internet ou Intranet) : structures et plans des cours, textes complets des cours (polycopiés électroniques), sélections de parties de cours, extensions pédagogiques des cours (études de cas, références bibliographiques, illustrations, etc.), … ; des versions sur cédéroms seront envisagées soit pour des raisons de commodité d'accès soit à des fins plus commerciales ;

- développer des dispositifs d'évaluation à faire fonctionner par voie électronique : évaluation des progressions des étudiants (tests, auto-évaluations, examens virtuels, évaluation des cours par les étudiants, … ;

- constituer des forums électroniques, généraux ou spécialisés, pour accompagner les cours existants ou pour suivre les étudiants dans leurs stages, projets, etc. ;

- accompagner certaines pratiques pédagogiques collectives particulières (stages de rentrée, semaines européennes, …) ;

- mettre tout ou partie des mémoires et autres travaux des étudiants en accès électronique, soit sous la forme de bases WAIS, soit en version html ; mettre sur site Web les listes ou catalogues de ces travaux ;

- constituer des viviers de ressources didactiques, compatibles avec des dispositifs structurés développés par ailleurs (ARIADNE notamment), ces ressources pouvant être des "leçons élémentaires", des modules plus importants, des cours complets, des dispositifs d'évaluation, des blocs de bibliographie,… 

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ENPC 2 : TIC, INNOVATIONS PEDAGOGIQUES, NOUVEAUX MARCHES

Un second axe de développement pour l'ENPC pourrait consister à jouer délibérément la carte de l'innovation (mais répétons le clairement ici, cette stratégie reste encore à l'état d'esquisse). Cela pourrait concerner :

- soit de nouveaux dispositifs pédagogiques, intégrés, pour les publics actuels ou les clientèles traditionnels de l'Ecole comme pour de nouveaux segments de marché en prolongement de l'existant (vers une filière de formation sous forme d'enseignement à distance ouverte également à la formation continue) ;

- soit la conquête délibérée de nouveaux marchés dans les domaines de la formation à distance, de l'auto-formation, de l'édition didactique électronique, ou encore de la formation "tout au long de la vie" selon des modalités plus personnalisées que les stages traditionnels de formation continue.

Dans le premier cas, on vise l'innovation pédagogique en profondeur et on met sur pied de tels dispositifs innovants en sollicitant des équipes interdisciplinaires ad-hoc et en choisissant des créneaux pour lesquels l'Ecole peut tirer avantage de cette démarche d'innovation. Cela implique, encore plus que pour "l'habillage électronique" des cours existants, la création d'une structure spécialisée (atelier pédagogique, centre de ressources, direction de l'innovation…) avec un budget d'incitation et de réalisation, avec des compétences complémentaires variées.

Dans le second cas, on positionne l'Ecole de façon volontariste sur le nouveau marché de l'info-connaissance, marché global, mondial, ouvert, constitué de multiples niches, mais ne recouvrant pas nécessairement les traditionnels découpages en place dans nos établissements (enseignement, formation continue). C'est un véritable pôle de conception, production et diffusion de produits et services d'info-connaissance que l'on met sur pied. Cela nécessite des compétences de "design" de tels produits, des ressources "auteurs", un bon dispositif de maintenance et aussi une solide structure de diffusion-commercialisation avec des spécialistes du marketing de ce genre de produits, des juristes, du service après-vente. La question principale qui se pose pour l'Ecole, nouvelle instance virtuelle de diffusion d'info-connaissance, est celle de son positionnement sur ce vaste marché :

- positionnement en termes de "disciplines" couvertes : l'Ecole française de l'aménagement du territoire, l'Ecole française du génie civil, le management public,…

- positionnement en termes de niches de besoins : formation des cadres des entreprises et organisations sur leur lieu de travail, formation tout au long de la vie (en auto-formation) des ingénieurs diplômés (abonnements à des services d'actualisation des connaissances), formation de mise à niveau, formation diplômante pour des promotions professionnelles, préparation à distance des candidats à des formations traditionnelles avancées de l'Ecole, etc.

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 CONCLUSION 

La consultation de l'ensemble des acteurs de l'ENPC est désormais bien engagée et la réflexion-action sur les TIC s'inscrit dans la démarche stratégique globale engagée par le nouveau Directeur de l'ENPC. Une chose est sûre, les TIC sont et seront incontournables (peut-on aujourd'hui ignorer Internet et le Web ?). Les jeunes générations sont déjà très à l'aise dans l'utilisation intensive des TIC. Certes, il faudra du temps à l'Ecole des Ponts pour parvenir à transformer les pratiques pédagogiques d'une institution fondée au milieu du XVIIIème siècle. L'institution a toutefois démontré à maintes reprises sa capacité à se réformer pour tenir compte au mieux de nouveaux besoins comme aussi de nouvelles technologies de diffusion de l'information. Alors, les TIC… plutôt une chance à saisir pour l'Ecole !

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