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Les croix de mission et les calvaires en Bourgogne

Cette étude publiée par le CNDP de Dijon donne d'utiles précisions architecturales et technique sur les croix érigées au cours des derniers siècles. Elle précise les conditions de passage de la pierre au fer forgé notamment après la période révolutionnaire.

Source A.S.E.R.U. – CNDP-Dijon (http://bit.ly/1GK4cZR)

Des croix ont souvent été érigées pour commémorer une manifestation appelée “mission”, destinée à entretenir et stimuler la foi des fidèles dans les villes ou les villages. Elles étaient prêchées par des prêtres missionnaires qui parcouraient le pays en organisant des cérémonies et des rassemblements importants aux cours desquels ils prêchaient d'une façon percutante et imagée. Il arrivait qu’à la fin de cette mission, on élevât une croix souvent en bois. Ce fut le cas à Dijon en 1824 où fut érigée, à l'emplacement du square Darcy, une croix en bois de grande dimension sur un piédestal en pierre. Elle se trouve actuellement dans le transept nord de la cathédrale Saint Bénigne.

Datation des croix et calvaires
Lorsqu'une croix ne comporte aucune date sur le piédestal ou le fût, il faut être très prudent pour le situer dans le temps, surtout entre le XVIe et le XIXe siècles. En effet, on a souvent repris le style d'une époque précédente. Au XVIIIe siècle, on a repris les formes du XVIe notamment pour les fûts. Au XIXe à l'époque romantique, le gothique est redevenu à la mode ; on a érigé des calvaires XIVe ou XVe flamboyants. D'autre part, beaucoup de calvaires ont été partiellement détruits à la révolution et remontés au XIXe. La date figurant sur le piédestal ne correspond pas toujours au reste de la croix qui est plus récent.

Évolution architecturale générale
Le style des croix suit l'évolution de l'architecture religieuse ou civile avec un rappel des éléments caractéristiques des différentes époques :

a) XIe et XIIe siècles
Comme on l’a dit plus haut, des XIe et XIIe siècles, nous ne possédons pratiquement aucune croix. On en trouve encore en Irlande, du VIIIe siecle, XIIIe et XIVe siècles.
Les éléments qui constituent la croix : piédestal, fût, chapiteau, croix, rappellent les éléments de l’architecture religieuse de cette période, notamment ceux des piliers. La croix qui les surmonte a ses bras très décorés de motifs végétaux. Ses extrémités sont saillantes (comme les croix potancées). Une face comporte le christ en croix, l’autre la vierge ou un autre personnage ou un motif symbolique. On trouve aussi des personnages sur le fût.

b) XVe siècle
C'est la période faste des calvaires. Ils comportent des emmarchements sur lesquels repose un piédestal massif de section octogonale, circulaire ou circulaire hélicoïdale comme à Pagny-la-Ville (21). Le piédestal est couronné par une ou plusieurs corniches superposées qui reçoivent le fût de la croix. La croix et le fût sont plus ou moins décorés et peuvent être accompagnés de personnages.

c) XVIe siècle
Nous sommes à la Renaissance et c’est le retour aux ordres gréco-romains employés largement dans les bâtiments civils et même religieux. On trouve toujours des emmarchements sur lesquels repose le piédestal qui reprend les moulurations et les éléments décoratifs de cette époque. Le fût est souvent cannelé, terminé par un chapiteau corinthien. Il peut être aussi de section octogonale. La croix est la plupart du temps très décorée. On voit apparaître à cette époque des croix évidées en losange : Charrey-sur-Seine (21) ce modèle sera repris par la suite. Si on trouve beaucoup de calvaires somptueux : Couchey (21), on remarque aussi de simples croix à section octogonale, ou hexagonale sur un socle (bas ou non) reposant sur une dalle.

d) XVIIe et XVIIIe siècles
Au XVIIe siècle, on note peu d'évolution par rapport à la période précédente un certain classicisme se dégage. Au XVIIIème siècle on voit apparaître des piédestaux aux flancs en courbe qui rappellent les meubles de l’époque. Si on note quelques calvaires plus monumentaux, l'ensemble tend à la simplification à la fin du siècle pour devenir le style qui se généralisera au XIXème siècle.

e) XIXe siècle
Après la révolution, on assiste à un renouveau de la foi et des pratiques religieuses. On recommence à édifier des croix de dévotion qui seront à peu de choses près toutes sur le même modèle : emmarchements, socle en forme de piédestal de statue mouluré. Il reçoit le fût ou colonne - ronde ou carrée - qui se termine par un chapiteau ionique, rarement corinthien, le plus souvent toscan. La croix qui surmonte l’ensemble est simple. Le christ ne figure pas toujours mais on peut trouver des motifs symboliques ou rien. Des croix en fer ou en fonte remplacent les croix de pierre lorsque celles-ci ont été brisées pendant la terreur.

Les croix en fer

La plupart des croix en fer que nous voyons au bord des routes sont relativement récentes et datent de la période post-révolutionnaire. Mais il en existe de beaucoup plus anciennes. Nous en avons vu une datée de 1576 près d’Orange. C'était le forgeron du village ou le maréchal-ferrant qui les réalisait. Ce sont de véritables chefs-d’œuvre de ferronnerie. Dans l’Yonne, le canton d’Aillant-sur-Tholon en comporte une cinquantaine ; celui de Saint-Julien-du-Sault encore plus. Sur ces croix réalisées en fer carré de 40 mm de section environ on trouve le nom du forgeron ou ses initiales et la date d'érection avec des abréviations telles que F.P.M. (“fait par moy”) ou P.P.N. (“priez pour nous”) ou P.P.M. (“priez pour moi”) et le nom et le prénom du donateur. Elles peuvent être simples, c'est-à-dire une croix de fer haute de 2,50 m à 3,50 m scellée dans un socle en pierre enterré ou une petite dalle.
Ces croix peuvent être au contraire très élaborées avec courbes, contre-courbes et les instruments de la passion. Elles peuvent être scellées dans un piédestal mouluré sur emmarchement - on trouve aussi des croix en fer pour remplacer celles en pierre, disparues par vandalisme ou par la révolution. On trouve aussi des croix en fonte, notamment dans les cimetières.


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